D'après
l'archéologue Albright, sa découverte était " la plus importante des temps modernes
". En explorant systématiquement la région, on localisa quinze autres grottes
abritant des parchemins, mais nulle part on ne dénicha des documents aussi capitaux
que dans la première, celle du petit berger. L'histoire
des HassidimPendant
la persécution religieuse d'Antiochos IV Épiphane au début du II° siècle av
JC, de nombreux juifs furent obligés de renoncer à leur foi; quelques-uns formèrent
cependant le groupe des hassidim (les " pieux "), résolus à rester fidèles à la
Loi de Moïse et à écarter toutes les impuretés. Plus
tard, les hassidim fondèrent un monastère à Qumran, près de la mer Morte, afin
de mieux vivre leur exigeant idéal; ils s'y consacraient au célibat, à la prière,
à la méditation des Écritures, au chant des hymnes et des psaumes en attendant
la venue imminente du Messie. Ils ne reconnaissaient pas l'autorité du GrandPrêtre,
apostat à leur yeux, et ne participaient pas au culte du Temple. Vers
l'an 68 apr JC, la X° légion romaine occupa le monastère et campa sur ses
ruines pendant deux années, jusqu'à la prise et la destruction de Jérusalem en
70. Prévoyant sans doute l'arrivée des Romains et désirant mettre à l'abri ses
précieux livres sacrés, la communauté de Qumran les enferma dans des jarres de
terre cuite et les cacha dans les grottes alentour. Probablement fut-elle ensuite
exterminée par les envahisseurs puisque aucun survivant ne revint récupérer les
rouleaux. Des
manuscrits préservés pendant 2000 ans
Sauvés
de la décomposition par la sécheresse quasi absolue, ils se conservèrent
ainsi pendant vingt siècles. Les manuscrits retrouvés (ci-contre un
fragment d'un manuscrit de qumram) sont aujourd'hui restaurés, déchiffrés,
traduits, publiés, commentés dans une multitude d'ouvrages savants ou
de vulgarisation.
L'état de conservation des manuscrits est inégal et la lecture peut en être rendue
fort difficile. Dans certains cas, la reconstitution du texte relève de la pure
et simple hypothèse. Les
experts paléographes leur attribuent des dates différentes : -
les plus anciens remontent III° siècle av. J.-C.
- les
plus modernes sont du I° siècle apr. J.-C., peu de temps avant la destruction
de Qumran.
- Le
quart environ est constitué de textes bibliques :
- tous
les livres de l'Ancien Testament à l'exception d'Esther,
-
on trouve ainsi un rouleau du livre d'Isaïe presque entier, de l'an 100 av. J.-C.
semble-t-il,
- des
fragments de ce même Isaïe copiés au III° siècle av JC,
-
un manuscrit de l'Ecclésiaste écrit vers 150 av. J.-C., c'est-à-dire un siècle
seulement après l'original,
-
un autre de Daniel encore plus rapproché du premier exemplaire - cinquante années
- dont on suppose qu'il fut rédigé vers 164 av JC.
- Outre
les copies bibliques si importantes pour rétablir le texte exact des Écritures,
les grottes de Qumran nous ont livré des manuscrits (commentaire de la Bible,
Règle de la Communauté, Rouleau de la Guerre, etc.) qui font mieux connaître le
pays de Jésus-Christ.
Les découvertes de Qumran s'inscrivent dans les recherches menées par les spécialistes
afin de remonter dans le temps le plus près possible des textes originaux. Bien
que fragmentaires, elles s'avèrent précieuses quand on les compare aux écrits
postérieurs dont on vérifiera ainsi l'authenticité; elles permettent surtout d'effectuer
un formidable bond en avant de plusieurs siècles, et même parfois de mille années.
En 1972, une nouvelle causa sensation : des petits fragments des papyri de Qumran,
où n'apparaissaient que quelques caractères, correspondaient à des passages du
Nouveau Testament; l'un d'entre eux, écrit vers 50 ap JC, appartiendrait à l'évangile
selon saint Marc, éventualité qui remettait en cause toutes les théories traditionnelles
sur la rédaction des évangiles. La plupart des savants repoussèrent en fin de
compte ces suppositions révolutionnaires.
Jean
Baptiste et Jésus, des qumranites ?
Certains
ont même été jusqu'à imaginer que Jean-Baptiste ou jésus étaient qumranites, tant
la ressemblance était frappante entre leur mode de vie et celui des membres de
la communauté, mais l'hypothèse est bien vite démentie par une comparaison plus
précise : les moines de Qumran se considèrent comme le " reste d'Israël ", " ceux
de la voie parfaite ", l'armée de Dieu en vue du combat apocalyptique qui se déroulera
bientôt entre la Lumière et les Ténèbres. Ils
méprisent la masse pécheresse et c'est pourquoi ils se sont réfugiés dans le désert.
Jean-Baptiste a lui aussi été élevé dans le désert (Lc 1:80) et il a commencé
ses activités près des rives du Jourdain, non loin de Qumran, mais il ne pense
pas que la plupart des êtres sont perdus; il les accueille, les exhorte au repentir
et à la conversion, et quand ils lui demandent ce qu'ils doivent faire pour se
sauver, Jean-Baptiste n'exige pas la façon de vivre des qumranites; il attend
d'eux seulement l'accomplissement de ce que nous appellerions justice sociale
et devoirs d'État ou de profession (Lc 3:10-14). De
son côté, Jésus-Christ ne se contente pas de guetter l'arrivée des pécheurs dans
le désert, il part à leur rencontre, trouve la Samaritaine près du puits de Jacob,
se fait inviter par des publicains, tel Matthieu, et se laisse oindre et baiser
les pieds par une femme repentie; à la table de son Royaume, les commensaux seront
précisément les " pauvres, paralytiques, aveugles et boiteux " (Lc 14, 21) alors
que les qumranites s'engageaient, en entrant dans la communauté, à " aimer tous
les fils de la lumière... et à haïr tous les fils des ténèbres ", et leur règle
refusait l'admission des " insensés, fous, sots, aveugles, paralytiques, boiteux,
sourds et mineurs ". |